Zahia Dehar : qui dit féministe dit antispéciste
Dans une tribune avec PETA, Zahia Dehar explique pourquoi toute personne féministe devrait aussi remettre en cause sa consommation de lait et d’œufs – produits issus de l’exploitation du système reproducteur d’animaux femelles – et devenir végane :
L’une des raisons pour lesquelles je suis féministe est parce que je suis antispéciste.
Certaines personnes peuvent considérer que ces deux choses n’ont aucun rapport, mais pour moi, elles sont inextricablement liées.
De mon parcours et de mon expérience, j’ai appris à parler pour moi-même et à prendre mes propres décisions. Je m’insurge souvent contre celles et ceux qui essaient de me dire ce que je devrais et ne devrais pas faire avec mon propre corps, et j’en fait souvent usage pour défendre les causes qui me tiennent à coeur. En 2015, par exemple, j’ai posée nue pour PETA pour rappeler que « TOUS les animaux sont faits des mêmes morceaux ».
Mais bien que je puisse choisir ce que je fais de mon corps, il m’est impossible d’oublier les milliards d’animaux femelles qui souffrent dans les industries de la viande, des produits laitiers et des oeufs. Il nous faut reconnaître que dans ces industries, les animaux femelles sont exploitées en raison de leur sexe, spécifiquement pour leurs organes reproducteurs et leurs capacités à « produire » d’autres animaux qui seront à leur tour exploités.
Les vaches vivent un enfer dans l’industrie laitière : à commencer par le fait qu’elles sont inséminées de force, et si on parlait d’une humaine on appellerait ça un viol mais parce que les animaux ne bénéficient pas de notre rang d’humain « supérieur », on ignore leurs besoins et désirs les plus basiques, pourtant elles ne sont pas consentantes. Elles n’ont pas plus envie de subir grossesse après grossesse pour activer leur lactation, ni de se faire arracher leur petit à la naissance afin que les humains consomment le lait qui lui était destiné. Personne n’a envie de vivre ce cycle infernal que les vaches endurent chaque jour, juste pour satisfaire nos habitudes de consommation. Et une fois que leur corps épuisé ne produit plus assez de lait, en moyenne à l’âge de 6 ans, elles sont envoyées à l’abattoir alors qu’elles auraient pu vivre jusqu’à 25 ans.
Imaginez-vous si cela arrivait aux femmes humaines ! Il faut arrêter de croire que leurs corps appartiennent aux humains, les animaux ne sont pas une ressource alimentaire ni vestimentaire. Elles ressentent, elles éprouvent des émotions et elles souffrent immensément.
Et puis il y a l’industrie des oeufs. La plupart des gens n’associent pas les oeufs aux cycles menstruels des poules, mais ils le devraient. L’industrie des oeufs a manipulé le système reproducteur des poules pour induire des cycles de ponte supplémentaires, les contraignant à produire jusqu’à 300 oeufs par an. Elles passent toute leur vie dans des conditions de détention si extrêmes qu’elles ne peuvent même pas étirer leurs ailes – tout ça pour la consommation et le profit.
Il n’y a pas si longtemps dans notre pays on considérait que la vie d’un homme était « supérieure » à celle d’une femme. Qui sommes-nous pour considérer que notre vie est supérieure à celle d’une vache, d’un cochon ou d’une poule ? L’idéologie qui considère les animaux comme moins importants que les humains est très similaire. Parce que les animaux ne peuvent pas riposter, cela signifie-t-il que nous pouvons leur faire subir ce que nous souhaitons ? Nous sommes tous des animaux et méritons tous de vivre sans subir l’oppression d’un autre genre ou d’une autre espèce.
Toute discrimination est une discrimination, que vous soyez une femme ou une poule. Mais j’en ai découvert l’antidote : la compassion. La compassion peut être définie comme « le souci de la souffrance d’autrui ». Nous devons commencer à considérer les expériences de celles et ceux que nous percevons comme différents de nous-même – indépendamment de leur sexe, race, orientation sexuelle ou même de leur l’espèce. Si nous voulons un monde plus juste, nous devons nous efforcer de mettre fin à tous les préjugés, pas seulement à ceux qui nous touchent personnellement.
Trois fois par jour, je montre ma compassion en mangeant des repas végans. C’est tout simplement le moins que je puisse faire pour les défendre toutes, quelle que soit leur espèce.
Cette tribune a été publiée en exclusivité sur PRBK.